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JH: Quelle évaluation faites-vous du départ de Mohamed El-Yazghi ? 
DL: La façon avec laquelle Si Mohammed a décidé de renoncer à sa position de responsable USFP représente surement une valeur ajoutée qualitative pour le champ partisan marocain. C’est une approche moderne pour solutionner les crises que vie actuellement notre parti et pour gérer les différences de points de vue sans en arriver à la rupture. Je tiens à rappeler que Si Mohammed El-Yazghi a été dans la direction du parti depuis les années soixante avec feu Bouabid et Benjelloun, il est resté plus de 33 ans membre du Bureau politique de l’USFP…
 
JH: Ce que vous dites est donc une des raisons qui ont poussé le BP à le démettre… 
DL: Je le répète : je n’ai pas parlé de démission forcée. Je mets l’accent sur le choix fait par l’unanimité des membres du bureau politique de travailler dans le cadre d’une direction collégiale dont la conséquence était la démission des camarades El-Yazghi et Radi des postes de premier secrétaire et de son adjoint. Je pense que le problème dépasse toutes les considérations personnelles. Nous sommes face à une réalité qui nécessite une évaluation urgente de la situation politique actuelle. Le camarade El-Yazghi pensait qu’il s’agissait d’une simple crise de parti, que l’Etat y était neutre et que notre participation au gouvernement était une participation confortable et juste, dans de véritables ministères ayant des rapports directs avec les problèmes concrets des citoyens… 

JH: Et vous, qu’en pensez-vous ? 
DL: J’adhère au contenu du communiqué du Bureau politique du parti, du 21 octobre 2007, qui a souligné que l’Etat n’était surtout pas neutre lors des dernières élections de septembre 2007 et dans la constitution du gouvernement qui en a découlé; que l’USFP était particulièrement visée par l’Etat et que les pratiques du passé sont en train de réapparaître… 

JH: Avez-vous des exemples concrets sur ce que vous avancez ? 
DL: En effet, je vous renvoie au même communiqué de l’USFP, qui a attiré l’attention sur ce nouveau venu au parlement, Fouad Ali El Himma, et sa liste des R’hamnas, la seule à avoir obtenu 100 % des sièges. Cette liste a pu rapidement encadrer, au sein du parlement, un groupe qui représente aujourd’hui la sixième force politique dans l’hémicycle ; mieux que le PPS et le FFD réunis… 

JH: Quelles sont les significations politiques du « projet Fouad Ali El Himma » ? 
DL: C’est un indicateur dangereux, le résultat d’un long processus visant à décrédibiliser les partis. Rappelez-vous, toutes ces campagnes visant à dénigrer les partis en les qualifiant d’inutiles, incompétents, etc… Rappelez-vous également, les attaques dont a été victime l’USFP dans certains media et le soutien matériel dont ont bénéficié certains des membres de notre parti qui ont quitté le parti et ont participé ainsi à la balkanisation de la gauche marocaine. Même les contraintes légales, dont le mode de scrutin, ont été un moyen de balkanisation de plus qui a dispersé les voix de la gauche. 

JH: Pensez-vous qu’il ira jusqu’au bout de ses objectifs ? 
DL: Je pense que l’USFP, en dénonçant ce projet, a pu freiner, un tant soit peu, son ampleur… 

JH: C’est un vœu ou un constat ? 
DL: En s’élevant contre ce projet, l’USFP a été le seul parti à alerter de ses dangers… 

JH: Mustapha Ramid (membre dirigeant du Parti justice et développement), dans une déclaration au Journal, a indirectement condamné ce fait… 
DL: L’important ce sont les positions officielles des appareils partisans et non celles d’un acteur politique ou un autre. Aucun parti, y compris le PJD, n’a attiré l’attention sur ce projet. C’est dommage, car ce que M. El Himma est en train de faire porte atteinte à la pérennité du processus démocratique que nous avons voulu pacifique et qui représente un exemple à suivre pour tout les pays du sud de la Méditerranée… 

JH: Vous voulez dire que le projet El Himma est une menace pour la démocratie au Maroc ? 
DL: Si quelqu’un veut véritablement servir la démocratie et le champ partisan au Maroc ce n’est surement pas par ce genre de manœuvres. Il est difficile pour un parti de s’enraciner dans une société. L’expérience du FDIC (ndlr : Front pour la défense des institutions constitutionnelles, constitué par A-R Guedira et une poignée de notables en 1963 pour affaiblir l’UNFP et l’Istiqlal, et disparu en 1965 après la proclamation de l’état d’exception) est une leçon de l’histoire qu’il faut méditer. 

JH: Ce n’est pas uniquement Ali Al Himma qui compte construire son parti par des notables, c’est le cas de votre parti, l’USFP, qui repose également sur les notables lors des échéances électorales… 
DL: Un parti n’est pas fait par ses seuls parlementaires ou conseillers. Un parti est d’abord une structure de production des idées, grâce à ses intellectuels, ses cadres et ses militants, ses mécanismes organisationnels, régionaux et nationaux, avec pour objectif fondamental l’encadrement des citoyens en vue de favoriser leur participation et leur implication dans la gestion des affaires locales et nationales. 
Fouad Ali El Himma peut avoir des cadres et des militants… Un parti politique se constitue en réponse à des besoins sociopolitiques dictés par son environnement, il ne peut émaner de la volonté individuelle d’une quelconque personne. 

JH: Même si cette personne est, dit-on, très proche du chef de l’Etat ? 
DL: C’est également pour cela qu’il doit renoncer à la constitution d’un parti. Le monarque est au-dessus de tous (partis, syndicats, associations…), c’est le roi de tous les marocains. 

JH: Allez-vous participer aux prochaines élections municipales, prévues pour 2009 ? 
DL: Avant de parler des élections, il faut procéder à une réforme réelle du mode de scrutin, de manière à ce que l’on n’aboutisse pas, comme c’est le cas aujourd’hui, à la balkanisation des grandes villes. Dans toute la stratégie de l’Etat visant à affaiblir le PJD, l’USFP a payé le plus lourd tribut. Il faut que cela s’arrête. Le mode de scrutin actuel a engendré une balkanisation à l’intérieur des grandes villes. Nous voulons aller vers une véritable unité de la ville, une gestion rationalisée des ressources des communes pour un meilleur service du citoyen et un réel encrage du développement humain. 

JH: Et les réformes constitutionnelles ? 
DL: C’est l’autre partie des réformes politiques que nous demandons. Je crois que je peux résumer cela ainsi : il est temps de procéder à des réformes constitutionnelles véritables. 

JH: C’est-à-dire ? 
DL: Renforcer l’institution du Premier ministre ; élargir les prérogatives du parlement ; renforcer les partis grâce à un mode de scrutin limitant la balkanisation… 

JH: Concernant les pouvoirs du Premier ministre, qu’est-ce que vous proposez concrètement ? 
DL: Le Premier ministre doit avoir un pouvoir de proposition total concernant la nomination des ministres. A cela, doit s’ajouter le droit de proposer dans toutes les nominations civiles. 

JH: Et sécuritaires ? 
DL: Cela pourrait faire partie des pouvoirs du parlement en matière de contrôle. On peut ainsi imaginer de hauts responsables sécuritaires se présenter devant les députés et répondre à des questions précises sur telle ou telle affaire. De plus il faut appliquer les recommandations de l’IER en la matière.
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